R.S : Bonjour Gary.

G.R : Bonjour Reynald.

R.S : Est-ce que tu te souviens du tout premier rôle où tu t’es dit : "OK, je suis vraiment comédien maintenant" ?

G.R : Je n’ai pas connu de déclic, ça a plutôt été un processus sur la longueur. Mais certains rôles y ont peut-être plus participé que d’autres... Sur scène, ce sont très clairement mes rôles chantés qui m’ont le plus transporté. La comédie musicale aura toujours une grande importance dans ma vie. Au cinéma, c’est le film Planète B, dans lequel j’ai un rôle anglophone, que j’ai plus tard doublé moi-même en français ! Et derrière la barre, c’est mon premier rôle principal pour la VF de Miguel Herrán (La Casa de Papel, Elite...) dans le film Vallée des Ombres.

R.S : Tu passes du cinéma au théâtre, du court au long métrage, au doublage... qu’est-ce qui t’attire le plus dans cette diversité ?

G.R : J’aime ce métier pour sa pluralité. Le renouveau quotidien, c’est ce qui me maintient toujours enthousiaste. Et on dit qu’un homme heureux est une barque qui navigue sous un vent favorable. Donc j’en profite tant que je suis dans le vent ! Plus sérieusement, je suis infiniment reconnaissant pour la chance que j’ai de me lever chaque matin pour aller vivre une aventure différente, travailler et évoluer avec ces gens incroyables. Car ce qui m’attire n’est pas tant la diversité des métiers, c’est surtout la diversité des personnes qui les composent. L’humain a une grande place dans ma vie. D’ailleurs, je ne bosse qu’avec des gens sympas.

R.S : Le théâtre, c’est un rapport direct au public. Qu’est-ce que ça change pour toi dans ton jeu ?

G.R : Avec le public, on ne triche pas, ou il le verra. Pour moi, le théâtre (la scène en général), c’est le travail pur, investi, vrai, grisant. C’est se mettre en danger, tout nu dans une foule : on te regarde, et parfois même on te voit. Sur scène, j’estime que j’ai le devoir de faire honneur à la confiance que me témoigne le public. S’il s’est déplacé pour venir s’enfermer dans une salle sombre, s’il est là à me regarder dire et faire des choses qu’il pense peut-être tout bas, c’est qu’il a foi en moi. Je me nourris de cette foi et j’aime penser que ça se ressent dans mes propositions de jeu.

R.S : Tu as joué dans "The Last Duel" de Ridley Scott, comment s’est passée cette expérience internationale ?

G.R : Ridley ne m’a pas marqué particulièrement. Je l’ai même très peu vu, pour être honnête. En revanche, j’ai été estomaqué par le sérieux, la discipline et l’investissement presque martial d’Adam Driver sur le set. C’est incomparable avec nos méthodes d’acting à la française. J’avais déjà eu l’occasion de remarquer ça sur le tournage des Trois Mousquetaires, où l’acteur britannique Jacob Fortune-Lloyd se démarquait bien au-delà de ce que nos acteurs français pouvaient offrir, et avec plus d’humilité.

R.S : Comment as-tu découvert le monde du doublage ? C’était une envie depuis longtemps ou une rencontre du hasard ?

G.R : Voyons, Reynald, ça n’existe pas, le hasard ;) Quand j’étais petit, je coupais le son de la télé pour faire dire ce que je voulais à Chirac ou PPDA. Ça faisait rire mes cousines. Des années plus tard, c’est Nicolas Justamon qui m’a "découvert", m’a appris les bases lors d’un stage de plusieurs jours, et surtout m’a convaincu moi-même en me disant : "Continue, va jusqu’au bout, tu es fait pour ça !" Je l’ai écouté, et me voilà. Merci Nicolas. Merci les cousines. Merci Chirac.

R.S : Qu’est-ce qui te plaît le plus dans cet exercice vocal, par rapport au jeu à l’écran ou sur scène ?

G.R : Avant de faire du doublage mon activité principale, j’ai fait mes armes avec le livre audio. J’en ai enregistré plus d’une trentaine entre 2022 et 2025. J’adore ça ! C’est contraignant, fatigant et chronophage, mais le bonheur de donner vie à une œuvre dans son intégralité, plutôt qu’à quelques scènes à l’écran ou au théâtre, est incomparable. C’est comme si, plutôt que d’être un acteur, tu étais à la fois TOUS les acteurs, mais aussi les actrices, et même la caméra ! La narration t’offre cette omniscience, ce pouvoir de forger l’histoire selon tes règles. Et en doublage, ce qui me plaît le plus, c’est l’absence de préparation et la rapidité d’exécution. Les tournages et le théâtre n’offrent pas une telle instantanéité. Des répétitions jusqu’à la sortie du film ou de la pièce, il faut des mois, voire des années, pour voir enfin si le résultat est bien porté. Les tournages m’ont enseigné la patience, mais j’en suis à un point dans ma vie où c’est l’immédiateté que je recherche. Le travail de la voix me comble pour ça.

R.S : Quels sont tes loisirs ?

G.R : Mon travail est mon passe-temps favori. J’aime aussi la linguistique, les langues étrangères en général, et l’anglais et l’italien en particulier. J’aime le cinéma de genre, la littérature SF, les mondes de l’imaginaire. Mais mon hobby le plus récurrent depuis l’enfance, c’est le chant. Je suis choriste pour la plupart des ciné-concerts qui tournent en France : Miyazaki, The Lord of the Rings, Gladiator... du pur bonheur ! On fait les Zéniths : c’est un frisson artistique incroyable.

R.S : Merci beaucoup Gary.

G.R : Merci à toi Reynald pour ce que tu crées, en reliant tout ce beau monde ensemble !

Interview d'octobre 2025